Quand Chopard fait rimer parures et couture
Le 22 mai, Caroline Scheufele, la coprésidente et directrice artistique de Chopard présentait sa collection de haute joaillerie Red Carpet sublimée par 77 tenues créées pour l’occasion: sa deuxième collection Caroline’s Couture. Isabelle Cerboneschi
« La collection Red Carpet 2024 s’appelle Contes de Fées parce que nous avons tous besoin de rêver », explique Caroline Scheufele, coprésidente et directrice artistique de Chopard, en dévoilant quelques bijoux de la collection de haute joaillerie destinée à être dévoilée lors du Festival de Cannes.
En avril dernier, Chopard a convié quelques journalistes à la manufacture, afin de leur faire découvrir les premières pièces de la collection de haute joaillerie Red Carpet présentée à Cannes le 22 mai. « C’est notre 27e festival de Cannes et il s’agit de la 77e édition et nous allons créer 77 pièces cette année. Le 7 est mon chiffre magique. Je n’aime pas les choses faciles aussi chaque année nous ajoutons une pièce à la collection Red Carpet. Cette collection me ramène à mes débuts, à la création de mon premier bijou pour Chopard qui était un clown articulé. A partir de là, ma vie s’est transformée de manière magique », poursuit Caroline Scheufele.
Les bijoux de la collection n’évoquent pas de contes précis, mais plutôt un univers féérique comme cette bague cocktail ornée d’une rubellite de 17.71 carats gardée par deux grenouilles au corps en titane serti d’une émeraude de taille poire, ce sautoir où une rose enchantée faite de rubellites, de tsavorites et de diamants de couleur est enchâssée dans un cristal de roche, ou encore ce collier en or éthique aux motifs de chêne découvert dans les ateliers. Sans oublier une délicate tiare sertie de plus de 30 carats de brillants et diamants taille poire, surmontée d’une fée aux ailes de nacre qui se détache et se porte en broche, parfaite pour une princesse de conte. « Nous avions déjà réalisé des tiares sur commande, ou des colliers qui pouvaient se porter à l’envers, comme des diadèmes, mais jamais pour la collection Red Carpet, souligne Caroline Scheufele. Pour moi, le conte de fée ne va pas sans une princesse et celle-ci doit porter une tiare. Les tiares, comme les broches, ont été oubliées par le passé et reviennent en force dans le monde de la joaillerie. D’ailleurs beaucoup d’hommes aujourd’hui nous demandent des broches.»
Cette collection a été dévoilée le 22 mai devant un public choisi lors d’un défilé qui a eu lieu à hôtel du Cap Eden Roc, à Antibes. Un doublé pour Caroline Scheufele qui présentait également sa deuxième collection Caroline’s Couture: 77 tenues créées spécialement pour servir d’écrins aux 77 parures de haute joaillerie. La coprésidente et directrice de Chopard avait déjà présenté l’an passé une première collection couture. Ce qui lui a donné envie de réitérer ? « Le succès inattendu de cette première collection! Il nous a dépassés. Juste après le défilé, des clientes voulaient acheter des tenues: or nous n’avions pas de salon d’essayage, personne pour prendre les mesures et nous n’avions pas fixé les prix (rires). C’était assez folklorique », confie-t-elle.
Après avoir longtemps présenté ses collections de haute joaillerie sur des mannequins vêtus des grands noms de la couture et de la haute couture, la coprésidente a pris conscience du fait que ses créations n’étaient pas toujours en parfaite harmonie avec les leurs. « Leurs robes sont magnifiques mais très ornées et les broderies de l’encolure, par exemple, entraient parfois en compétition avec nos bijoux. Un de nos colliers possède une valeur au moins dix fois supérieure à celle d’un vêtement de couturier, or il était noyé parmi les embellissements. J’ai donc eu l’idée de créer une collection qui soit à la fois un écrin pour nos parures et qui mette en valeur la femme qui les porte. J’ai eu envie de relever un nouveau challenge: sortir de ma zone de confort, élargir l’univers de Chopard à la couture, développer des tissus avec des teintes reflétant celles des pierres précieuses de nos parures, travailler avec des artisans aussi excellents que les nôtres et imaginer des robes et des modèles en parfaite cohérence avec mes collections de haute joaillerie», explique-t-elle.
Si Caroline Scheufele crée des bijoux depuis des décennies, elle sait que l’on ne s’improvise pas créatrice de mode. Pour mettre ses désirs sur papier puis les réaliser en tissus, elle a choisi de travailler avec le designer Fridtjof Linde, à qui elle avait déjà par le passé confié la création de ses propres robes. « J’ai aimé sa personnalité, sa vision de la mode, son amour des détails qui est en synergie avec notre vision de la joaillerie et de l’horlogerie », explique-t-elle.
Pour cette deuxième collection, certains tissus ont été développés spécialement dans des ateliers en Italie, chez Gentili Mosconi, ainsi que chez le célèbre fabricant de textile et de broderie saint-gallois Jakob Schlaepfer qui travaille avec les plus grands noms de la couture. Les broderies ont été réalisées en Inde, à l’Institut Kalhath, « un lieu où se transmet le savoir-faire ancestral de la broderie indienne et où les artisans brodeurs sont formés et rétribués à leur juste valeur », souligne Caroline Scheufele. Quant aux délicats papillons qui parsèment certaines tenues et les chapeaux d’une intense poésie créés par Philip Treacy, ils ont été brodés par l’ethnie Miao, en Chine. « Quand j’ai vu leurs broderies, je suis restée bouche bée: ce sont des œuvres d’art! J’ai envie de promouvoir les savoir-faire du monde entier », poursuit-elle.
Quelques looks masculins viennent scander la collection: ils ont été créés dans les ateliers du tailleur Cifonelli, à Paris. « La demande est venue d’un client de la joaillerie qui m’a posé cette question: quand allez-vous créer des tenues pour nous? Et il n’était pas le seul… », relève la coprésidente de Chopard. C’est son amie la top-model Eva Herzigova qui a clôt le défilé, arborant une robe bustier et parure sertie d’un diamant jaune de toute beauté.
« Nous vivons une période très difficile, je n’ai plus envie de regarder les informations le matin sinon je ne pourrais pas créer ce que je crée, confie Caroline Scheufele. Le monde est devenu agressif et amer. Que puis-je faire? Cette collection est ma réponse: faire rêver et continuer à aimer la vie. »