Faire scintiller les détails

En cette fin d’année 2021, ces temps incertains où les étoiles auraient grand besoin d’être rallumées par les poètes, les photographes Buonomo & Cometti font scintiller les détails. Portés indifféremment par des hommes ou des femmes, les bijoux Begüm Khan révèlent leur symbolisme. Texte: Isabelle Cerboneschi. Photos: Buonomo & Cometti.

Que nous reste-t-il lorsque l’on doit apprendre à marche forcée à vivre au plus que présent faute de pouvoir faire des plans d’avenir. Et quand bien même on a toujours su que l’on ne maîtrisait pas le futur, on regrette ces temps d’avant où il était possible de tirer des plans sur les comètes, sur toutes les comètes. Il reste le goût du beau, envers et contre tout, il reste l’envie et le désir.

Dans le secret de leur atelier, les photographes Buonomo et Cometti ont convié des mannequins afin de jouer leur rôle d’embellisseurs. Leurs images ressemblent à des portraits du Caravage, le Bacchus conservé à la Galerie des Offices à Florence, par exemple. On a dit que le Caravage rendait les hommes qu’il peignait désirables. Le désir est souvent dans les yeux de celle ou celui qui regarde.

Dans les images de Buonomo et Cometti, il est dans les yeux de celle et celui qui pose. Désir d’être, désir de plaire, de se plaire, quoi qu’il advienne. Il est dans ces yeux ennoblis, comme passés à la feuille d’or, dans ces paillettes qui projettent de la lumière dans l’ombre. Il est dans les bijoux signés Begüm Khan qui scintillent aux oreilles des hommes comme des femmes, il est dans ces insectes dorés immobiles, dont la symbolique aujourd’hui nous échappe, parce que nous avons perdu le sens du sacré.

Begüm Kiroglu, elle, n’a rien perdu. La jeune femme, qui a créé la marque de bijoux Begüm Khan, a grandi à Istanbul dans une famille de collectionneurs d’art ottoman, avec, comme terrain de jeu, Le Grand Bazar. Sa ville de naissance étant située à la frontière entre l’Orient et l’Occident, elle a choisi de pousser plus loin vers l’Est, jusqu’en Extrême Orient, afin d’étudier la culture et l’art chinois à Shanghai.

« J’ai appris que l’art ne devait pas se limiter à la porcelaine précieuse cachée derrière une vitre, dit-elle. L’art faisait partie de notre vie quotidienne et je le considère comme une façon de vivre. » En créant sa marque de bijoux, la jeune femme a pris le partie de porter une certaine forme d’art aux oreilles, autour du cou ou du poignet. Chaque pièce en bronze plaqué or est fabriquée à la main par des artisans turcs dans un ancien atelier situé près du Grand Bazar.

La nature l’inspire et ses bijoux sont une sorte d’Eden peuplé de scarabée, de coccinelles, de tortues, de poissons koï qui évoluent au sein d’une nature luxuriante ornée de saphirs roses et de perles baroques. Il y a un monde contenu dans ses bijoux. Il y a un monde contenu dans ces quatre images, et des lumières, et des ombres, et des fulgurances, et des intentions…

Que chacun cherche et trouve en cette fin d’année de lumière et d’ombre, le beau détail scintillant.