Plongée en horlogerie sportive

Depuis son invention grand public dans le courant des années des cinquante, la montre de plongée s’impose comme l’une des meilleures ventes, toutes marques confondues. Question de mode ou phénomène de société ? Immersion dans le monde du silence. Vincent Daveau. Photos: Denis Hayoun.

Même si l’été est passé, les montres de plongée continuent d’orner les poignets de leurs propriétaires redevenus des citadins par la force des choses. Le garde-temps de sport incarnant un moment d’insouciance et de plaisir est le bienvenu à l’heure de la rentrée. Il permet de supporter les tracas des métropoles et la grisaille de l’automne débutant. « Aujourd’hui, avec l’émergence des ordinateurs dédiés, les montres de plongée mécaniques ne servent techniquement plus à rien, mais elles font toujours de l’effet aux amateurs de montres », relève Laurent Picciotto, le fondateur de la boutique Chronopassion.

Surfer sur la vague

A sa façon, ce garde-temps demeure essentiel dans une collection parce qu’il véhicule de « bonnes ondes » et envoie un messages de dynamisme et de courage. Les hommes restent de grands enfants et tous avouent avoir un moment ou un autre choisi leur voiture, leur montre et bien d’autres choses, en fonction du héros qu’ils rêvaient d’être un jour. Dans ce domaine, les modèles ayant une vraie aura sont peu nombreux, mais reconnus et recherchés justement parce que l’effet qu’ils produisent est garanti.

La Rolex Oyster Perpetual Submariner demeure de loin en tête des références les plus prisées. Depuis son lancement en 1954, avec son design minimaliste, elle est devenue une icône. Elle offre bien plus que l’heure : la certitude d’appartenir au cercle très fermé des amateurs ayant fait le choix de porter la première montre de l’agent secret le plus célèbre du grand écran. Cela coûte d’être un héros, mais le retour sur investissement se matérialise par une légitimation tacite de l’entourage et sans doute aussi un peu de jalousie.

Les plus jeunes ou ceux préférant s’identifier à d’autres personnalités incarnant le plus célèbre des espions, focaliseront sur la nouvelle Seamaster Diver Professional d’Omega. Résultat garanti car l’objet a une belle filmographie à défaut d’avoir un pedigree reconnu dans l’univers de la plongée professionnelle. Finalement, ce qui compte, c’est la reconnaissance et si le MI6 l’a voulue comme montre officielle, cela doit faire l’affaire comme certification auprès d’un public qui ne l’utilisera jamais en plongée réelle, sinon comme back-up de l’ordinateur de plongée.

Plonger en aventure

L’amateur de montres de plongée peut avoir envie d’aller au-delà du mythe et se rattacher à une épopée horlogère ayant des racines solides. Ceux-là iront glaner leur montre du côté des aventuriers réputés, des plongeurs professionnels ou des militaires engagés. Les aventuriers ont toujours eu la cote et ont été sollicités par les marques pour construire des histoires. Panerai a choisi Mike Horn, et aujourd’hui Guillaume Néry comme ambassadeurs, et cela fonctionne à merveille pour la Submersible qui peut être considérée, ainsi que le dit le site de la maison, comme un instrument de survie. Il n’en fallait pas plus pour créer un mythe…

Les militaires ont toujours été de bons clients, mais aussi une source intarissable pour écrire la légende de produits horlogers. Blancpain en sait quelque chose puisque la Fifty Fathoms a été pensée en son temps par des militaires français. Ensuite elle a servi dans d’autres unités dont celles de l’Armée allemande. La nouvelle Fifty Fathoms Barakuda de Blancpain, rééditée en série limitée à 500 exemplaires en 40,3 mm de diamètre, a eu quant à elle son heure de gloire au poignet de militaires engagés et devrait satisfaire les adeptes de modèles dotés d’une histoire intense et vraie.

Quant à la maison Rolex, elle propose cette année une version en or et acier de la fameuse Sea-Dweller dont le modèle original date de 1967. Une montre de plongée professionnelle mythique qui a imposé la valve à hélium comme élément de sécurité pour les plongeurs en saturation (ceux travaillant par grand fond et devant passer du temps en caissons de décompression).

Ecrire sa propre légende

A bien y regarder, il n’existe pas énormément de montres de plongée de légende et encore moins qui soient exploitables en utilisation réelle puisque tous les clubs de plongée de bonne tenue les interdisent et imposent des montres électroniques communément appelés « ordinateurs de plongée », qu’ils fournissent la plupart du temps afin d’éviter les accidents.

Les amateurs de montres de plongée ont donc tout intérêt à choisir leur garde-temps aquatique en fonction de ses goûts, et non pas en fonction de ses aptitudes, pour être certain de pouvoir écrire sa propre légende avec elle au poignet. Les amateurs de belles histoires nautiques qui se laissent influencer par les publicités fort bien faites se pencheront sur les récentes versions Diver de la manufacture Ulysse Nardin. Ceux qui apprécient les coraux et l’assistance qui peut leur être faite regarderont du côté de chez Oris qui s’est fait une spécialité de ces instruments abordables.

Mais la liste des modèles possibles est finalement sans limites puisque toutes les marques ou presque en disposent à leur catalogue, les unes inspirées du passé et les autres tournées vers l’avenir. Même les fans de mode pourront s’intéresser à la nouvelle Chanel J12 qui, revisitée avec subtilité et motorisée avec talent (calibre de la manufacture suisse Kenissi), possède presque tous les codes de la montre de plongée (celles de la norme ISO 6425*), y compris son étanchéité.

Les passionnés de descente en eaux profondes qui voudraient vraiment porter la montre la plus adaptée à leur sport de prédilection, pourront se tourner vers des références connectées comme en proposent Alpina et Garmin. Ces outils sportifs sont les premiers représentants « horlogers » d’une nouvelle ère qui, dans ce segment de produit, a toute sa raison d’être.

Note:
*Les montres de plongée répondent à la norme ISO 6425 de 1996. Elles doivent être étanches jusqu’à 100 mètres (au moins), disposer d’un contrôle de mesure du temps écoulé gradué en minutes (lunette tournante). La lecture de l’heure doit être assurée dans l’obscurité, et le mouvement, pourvu d’un système indiquant son fonctionnement (trotteuse de seconde), doit être protégé des influences magnétiques.