Timothée Chalamet, le nouveau visage du parfum Bleu de Chanel

L’acteur franco-américain est le nouvel ambassadeur de Bleu de Chanel. Capturé par le regard du célèbre photographe Mario Sorrenti, Timothée Chalamet incarne une fragrance dont l’identité est multiple, à son image. Dans une interview menée par Chanel, l’acteur laisse transparaître une part de lui méconnue. Photographies: Mario Sorrenti. Texte: Isabelle Cerboneschi

Timothée Chalamet nouvel ambassadeur Bleu de Chanel. Photo ©Mario Sorrenti pour Chanel

Avec son corps d’éphèbe, son visage qui garde quelques traces d’adolescence malgré ses 28 ans, ses cheveux bruns embroussaillés, Timothée Chalamet, parfaite antithèse du bad boy, plaît aux femmes. Toutes. Énormément. Au point qu’un néologisme a été inventé pour le dire: la Chalamania. Il plaît à la maison Chanel aussi puisqu’elle lui a confié le rôle d’ambassadeur de la fragrance Bleu de Chanel.

Les racines de l’acteur s’ancrent des deux côtés de l’Atlantique, la France pour la branche paternelle, l’Amérique pour la branche maternelle, qui est aussi le pays où il est né en 1995. Sa mère, Nicole Flender, diplômée de Yale, fut une danseuse et une actrice avant de devenir agent immobilier tandis que son père, Marc Chalamet, est journaliste. Si Timothée Chalamet a fait ses études au lycée artistique de LaGuardia à New York, le cinéma n’est pas un choix hasardeux:  son grand-père est le scénariste Harold Flender, son oncle, Rodman Flender est un acteur, scénariste, réalisateur et producteur et sa tante, Amy Lippman est également scénariste et productrice. Avec un tel pedigree, difficile de d’échapper à un destin cinématographique, quel qu’il soit.

C’est le film Call Me by Your Name, de Luca Guadagnino, qui le révèle au grand public en 2017 et lui ouvre les portes de Hollywood. En 2018, Timothée Chalamet qui n’a alors que 22 ans est nommé aux Oscars du meilleur acteur, aux Goldens Globes ainsi qu’aux British Academy Film Awards pour ce rôle. On le compare vite à Leonardo DiCaprio après le film Titanic, mais comparaison n’est pas raison. On l’a vu depuis endosser une panoplie de personnages multiples, notamment celui de Paul Atreides dans le blockbuster Dune qui a remporté six Oscars en 2022. On l’attend impatiemment dans le biopic sur Bob Dylan, A Complete Unknown, dont le tournage est prévu cet été et dans la comédie musicale Wonka, un film de Paul King sur les origines du personnage Willy Wonka qu’il incarnera.

J’ai été élevé dans une culture différente de celle des gens qui m’entouraient. Je passais mes étés dans un petit village français appelé Le Chambon-sur-Lignon, où la vie était aux antipodes de mon quotidien new-yorkais, Timothée Chalamet

Depuis le 15 mai, Timothée Chalamet est officiellement le visage de Bleu de Chanel. Cet aromatique-boisé aux notes hespéridées, lancé en 2010, et incarné alors par l’acteur français Gaspard Ulliel, existe en trois concentrations, soit trois visages différents d’une même fragrance. L’eau de toilette, comme l’eau de parfum sortie en 2014, ont été créées par Jacques Polge, le parfumeur de la maison. Quant au dernier élément de la trilogie, le parfum, apparu en 2018, il a été écrit par Olivier Polge qui a succédé à son père à la tête de la création des parfums Chanel en 2015. Il lui a fallu trouver le ton juste et conférer à la fragrance d’origine une puissance, une intensité nouvelles, sans pousser le curseur trop loin. La senteur s’ouvre sur des notes de citron associé à la lavande et au géranium et s’épanouit sur des notes boisées de santal et de cèdre qui lui confèrent amplitude et volupté. «Ce parfum renferme une dualité entre une fraîcheur évidente et une forme intime et soudaine de sensualité et de force», déclare Olivier Polge.

Un nom – Bleu de Chanel – trois identités. Un rôle taillé sur mesure pour Timothée Chalamet que l’on découvrira dans la nouvelle campagne publicitaire en juin. « Bleu de Chanel contient la quantité parfaite de certitude et d’intensité pour représenter un homme qui refuse d’être rangé dans des cases. Un homme qui ignore les faux-semblants et n’a pas peur de se montrer vulnérable sous sa carapace solide et désarmante », précise Olivier Polge.

«Ce parfum renferme une dualité entre une fraîcheur évidente et une forme intime et soudaine de sensualité et de force», Olivier Polge, parfumeur créateur de la maison Chanel

«Je ne suis pas une héroïne mais j’ai choisi ce que je voulais être et je le suis », affirmait Gabrielle Chanel*. Cette phrase, Timothée Chalamet pourrait la reprendre à son compte. Le succès phénoménal qui accompagne sa jeune et pourtant longue carrière, ne lui a pas fait perdre le sens d’une certaine réalité.

Au fil d’un entretien mené par Chanel, l’acteur laisse apparaître une part de lui que l’on connaît mal. Il évoque le trouble né de sa double appartenance, élevé dans une culture à la fois française et américaine, il parle de son amour de la littérature et particulièrement de la philosophie et du nihilisme d’Arthur Schopenhauer. Il évoque aussi ses premiers souvenirs parfumés, du cèdre, et reconnaît le privilège de vivre cette vie-là et d’avoir un toit au-dessus de sa tête. Et les pieds sur terre, selon toute évidence.

*L’Allure de Chanel, Paul Morand © Hermann 1976

Bleu de Chanel @Chanel

INTERVIEW

La campagne à venir marque votre première collaboration officielle avec une maison de beauté et de mode. En quoi ce rôle de nouvel ambassadeur de Bleu de Chanel intervient-il au bon moment pour vous?

Timothée Chalamet : Je n’étais pas particulièrement en recherche de partenariat quand on m’a proposé de devenir le nouvel ambassadeur de Bleu de Chanel. Mais c’est finalement une décision assez similaire à celle d’accepter de jouer dans un film. J’ai la chance de me trouver à un moment de ma carrière où j’ai la possibilité de choisir moi-même des projets qui me font vibrer. Quand toutes les pièces du puzzle semblent s’assembler, il n’y a pas de question à se poser. On se laisse griser par l’idée et on fonce.

Le caractère disruptif et pionnier de Chanel en mode et en beauté a largement été démontré et reconnu à travers son histoire. Quels éléments de la maison font écho à vos propres sensibilités ?

Il y a chez Chanel cette assurance subtile qui n’est pas ostentatoire mais raffinée, élégante. C’est une des choses qui m’a vraiment donné envie de collaborer avec la marque. Et puis, il y a aussi une dimension de confiance, de respect et d’intemporalité envers les grandes figures créatives et toute personne associée à la maison, passées et présentes.

On se souvient de cette phrase de Gabrielle Chanel : « La mode se démode, le style jamais. »

Tout est dit ! Je crois que je vais lui voler cette phrase. Chanel est une marque, une signature qui aurait toute sa place dans les cours de culture dispensés à l’université. Je me souviens d’une fois où, dans l’un de mes cours d’anthropologie à la fac, nous avons évoqué des marques de luxe dont le produit, l’image et le storytelling sont éminemment cohérents et ancrés. Récemment, un jour où je ne travaillais pas, je me suis rendu dans la boutique Chanel de Beverly Hills – quand vous entrez, vous ressentez tout de suite un grand respect pour la tradition.

Chanel entretient une histoire de longue date avec Hollywood et le cinéma – de la première visite de Gabrielle Chanel à Los Angeles en 1930, pour habiller Gloria Swanson, à l’engagement fort de la maison pour la préservation de chefs-d’œuvre cinématographiques, en passant par son soutien constant à des réalisateurs et acteurs émergents comme reconnus. La découverte de ce lien entre Chanel et l’industrie du cinéma a-t-elle influencé l’intérêt porté à cette collaboration ?

En tant que passionné de réalisation et d’art dramatique, collaborer avec une maison de mode et de beauté qui a une histoire si vaste et si riche avec le cinéma signifie énormément pour moi. D’autant que Chanel m’a offert l’opportunité incroyable de travailler sur un court métrage inspiré de Bleu de Chanel réalisé par Martin Scorsese – un des plus grands réalisateurs américains de notre époque.

Bleu de Chanel parle d’un homme profondément connecté avec lui-même et avec le monde, un peu comme vous. Le parfum joue sur de multiples contrastes – l’ombre et la lumière, l’aube et le crépuscule, notes boisées aux accents de fraîcheur… Qu’est-ce que Bleu de Chanel représente pour vous ?

Ce que j’aime particulièrement dans Bleu de Chanel, c’est que le parfum et la narration qui lui est associée laissent libre-cours à l’interprétation. Fondamentalement, il est question d’assurance subtile et de l’interprétation propre à la personne qui le porte, de la façon dont elle s’approprie le parfum. C’est tout ce qui importe.

Comment vous sentez-vous lorsque vous portez Bleu de Chanel ?

En portant Bleu de Chanel, on cherche à souligner une expérience particulière, ou peut-être un look, une occasion, un rendez-vous. Pour moi, derrière chaque parfum, il y a une intention. Je ne suis pas quelqu’un qui se parfume tous les jours. Quand je le fais, c’est pour marquer un moment. Plus tard, c’est le souvenir de ce moment précis qui lui donne tout son sens.

La philosophie de Bleu de Chanel est fermement ancrée dans le fait d’être quelqu’un qui ne s’arrête pas aux frontières imposées par la vie et voit plus loin que ce qui est devant lui pour évoluer. Est-ce que cela fait écho à votre parcours, ou votre vision de la vie ?

Pour moi, la notion d’évolution et de réalisation renvoie à une aspiration constante à être maître de soi. Il y a une vraie force à être la meilleure version, la version la plus authentique de soi-même et à exprimer ce qu’on choisit d’avoir ou de ne pas avoir dans sa vie.

Y a-t-il un souvenir de parfum que vous gardez de votre enfance ?

Quand on était petits, ma sœur suivait des cours à l’école de danse Rosella Hightower de Mougins, dans le sud de la France. Un jour, ma mère nous a emmenés visiter une parfumerie à Grasse. J’ai adoré cette expérience, et je suis reparti de là avec un spray d’ambiance senteur cèdre pour ma chambre. Par erreur, j’en ai vaporisé sur mes vêtements, l’odeur était très puissante. Pourtant, je me souviens parfaitement avoir ressenti ça comme une expression créative qui définirait l’odeur de ma chambre. C’était très français, avec un côté nostalgique.

Quel est votre premier souvenir d’un parfum Chanel ?

Ma grand-mère a offert N°5 à ma sœur pour Noël.

Il y a énormément de nuance et de subjectivité autour du pouvoir du parfum et ce qu’il représente, évoque et convoque. Comment le parfum aide-t-il à forger, préciser, souligner notre identité et la façon dont on se montre au monde ?

Ce qui me vient d’emblée, c’est l’identité. C’est un terme très en vogue s’il en est. L’émancipation créative et le fait de se créer un style pour ne pas entrer dans une case ne sont pas nouveaux mais continuent d’être amplifiés par les réseaux sociaux. Je pensais, sur le chemin pour venir ici, que le parfum reste quelque chose qui échappe aux médias visuels. C’est l’un des derniers bastions de l’expression personnelle créative qui n’a pas été standardisé dans l’espace visuel. C’est vraiment pour soi – un peu comme la sensation des vêtements sur la peau qui ne peut pas se partager, contrairement à leur rendu et leur tombé qui s’offrent aux yeux de tous.

Le parfumeur créateur des parfums Chanel Olivier Polge parle souvent de rendre visible l’invisible.

C’est une très belle façon de le dire. Il y a quelque chose de l’intention réfléchie dans le rituel qui consiste à se parfumer avant de sortir de chez soi. Vaporiser Bleu de Chanel, c’est un peu un acte instantané d’affirmation de soi volontaire et immédiate.

Quels éléments de votre éducation entre la France et les États-Unis ont contribué à définir votre personnalité ?

J’ai été élevé dans une culture différente de celle des gens qui m’entouraient. Je passais mes étés dans un petit village français appelé Le Chambon-sur-Lignon, où la vie était aux antipodes de mon quotidien new-yorkais. Et pourtant, la dualité des choses autour desquelles je gravitais, artistiquement comme culturellement – que ce soit Jay-Z, le cinéma d’art et d’essai, la littérature, ma passion pour l’équipe de foot AS Saint-Étienne, le folklore américain qui entoure McDonald’s et la Xbox 360 – était omniprésente. Mais toujours dans un esprit positif et d’ouverture.

Il semble finalement que vous ayez navigué assez naturellement entre les dualités des modes de vie français et américain.

Pour moi, il y avait un contraste tellement fort entre le «self-empowerment» à l’américaine, même la relation que j’ai eue avec le métier d’acteur à un jeune âge, et la façon dont les choses se passent en France, où l’on sentait qu’il y avait un tel respect du temps, de la tradition et de la conversation ! Ce sont des choses pour lesquelles je n’avais pas vraiment de considération avant parce que je me sentais plus proche des coutumes stéréotypiques américaines. Et puis, en grandissant, j’ai laissé davantage mon côté français s’exprimer, ce qui explique d’ailleurs mon choix de représenter Bleu de Chanel à ce stade de ma vie. Pendant la pandémie, je me promenais dans Paris et j’ai vu, sur la table d’un café, une addition qui attendait manifestement là depuis 3 heures, alors que les quatre personnes à côté étaient encore en pleine discussion. À Los Angeles, on ne passe pas plus de 45 minutes à table. Les États-Unis ont un temps d’avance sur bien des choses, mais la France a pour elle la mode, l’expression de soi et une identité qui contrastent merveilleusement avec un mode de vie passif très traditionnel. J’en suis venu à prendre conscience et embrasser ces contradictions des deux cultures, qui se retrouvent aussi en moi.

Dans vos choix professionnels, êtes-vous du genre à rechercher et vous abandonner à la peur ?

Sans peur, où est le challenge ?

Quel est le point commun entre les personnages incroyablement variés que vous avez incarnés à l’écran?

Avec un peu de chance, chacune et chacun peut s’y retrouver. Pour autant, je ne dirais pas qu’on s’identifie d’emblée à mon personnage de cannibale dans Bones and All, ou de chocolatier déjanté dans Wonka. Mais je crois qu’il y a quelque chose de concret dans les différents personnages que je joue.

Vous êtes un fervent lecteur, amateur de grands penseurs tels que Fiodor Dostoïevski, Fernando Pessoa et George Orwell. Qu’est-ce qui vous attire dans la littérature ?

C’est une discipline qui m’a toujours intrigué. Je vois cela comme un moyen de saisir où l’on est à un instant. Des bons mots qui donnent du sens à la vérité de la vie – voilà ce qui se joue. Finalement, c’est tout ce qui aide à donner du sens au quotidien et à demain, où l’on va. J’ai aussi toujours aimé Arthur Schopenhauer quand j’étais à l’université, pour son œuvre existentiellement nihiliste particulièrement juste, et le poète français Arthur Rimbaud qui a signé ses plus grands textes à 19 ou 20 ans. Bob Dylan s’en est aussi largement inspiré.

Timothée Chalamet le nouvel ambassadeur de Bleu de Chanel ©Mario Sorrenti pour Chanel

Où trouvez-vous généralement l’inspiration ?

J’essaye de faire preuve de davantage d’ouverture à ce sujet. Initialement, c’était dans la musique. Maintenant, ça peut être partout. L’avantage à gagner en âge et en maturité, c’est qu’il devient possible de puiser son inspiration dans sa propre expérience et dans les gens à qui l’on s’intéresse autour de soi. Plus jeune, on se tourne vers les réseaux. En vieillissant, on se tourne vers des sources d’inspiration plus personnalisées, plus authentiques.

Qu’est-ce qui excite le plus votre curiosité en ce moment ?

Pour tout vous dire, je réfléchis beaucoup à ce que ça aurait été de vivre à New York dans les années 1960 ! Je m’apprête à interpréter Bob Dylan dans A Complete Unknown et je n’arrête pas de penser à comment était la vie au cœur de New York à l’époque – principalement parce que le quartier est devenu tellement cher aujourd’hui. Comment c’était, quand c’était encore accessible, et en même temps si riche sur les plans artistique et culturel ? C’est quelque chose qui occupe vraiment mes pensées parce que même moi, j’ai grandi dans une New York différente de celle d’aujourd’hui. Donc voilà, c’est ma réflexion du moment.

De quoi êtes-vous le plus reconnaissant en ce moment ?

Je suis reconnaissant de tout, et notamment du fait de savoir que j’ai un toit sur la tête le soir, la chance que j’ai de continuer à faire quelque chose que j’adore… Je suis reconnaissant d’entamer cette relation avec Chanel et d’apporter ma contribution au patrimoine riche et chargé d’histoire de la Maison en participant à l’écriture du nouveau chapitre de Bleu de Chanel.